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Le blog de Pierre Lalanne
6 août 2009

C'est l'espérance folle...

Les faits sont têtus...
Quels que soient les gouvernants, les mois d'été donnent généralement lieu à l'habituelle série d'augmentations de toutes sortes...taxes, cotisations, charges et autres décisions qui impacteront significativement le quotidien...
Quoi, augmenter les salaires...les bas salaires, dites-vous...mais, il n'y faut point penser...l'économie ne s'en relèverait pas...
Le summum cette année...le vote du parlement sur le travail le dimanche...une incontestable avancée sociale...
Cela favorisera la création d'emplois...si,si...puisqu'on vous en assure...

Diserts à l'ordinaire, les différents médias semblent avoir négligé de telles informations.
Fallait-il se garder d'apeurer ou de contrarier le bon peuple...
Pas d'informations non plus sur l'un des faits marquants de l'histoire, de la Révolution française...une date...la nuit du 4 août 1789...l'abolition des privilèges et des droits féodaux...
Fallait-il se garder aussi de donner certaines idées...de mauvaises idées au bon peuple...

nuit4aoutQue l'on se souvienne...
Trois semaines après la prise de la Bastille, dans la nuit du 4 au 5 août 1789, l'Assemblée Constituante met fin au système féodal.
Se hasarderait-on à dire, aujourd'hui encore, la construction identitaire de la France...la disparition de l'Ancien Régime fondé sur les privilèges, sur la naissance, sur le rang...
L'Assemblée Constituante renverse une organisation sociale plusieurs fois centenaire en lui substituant un ordre nouveau régi par le principe de l'égalité de tous devant la loi.
Les sujets deviennent des citoyens...
Il n'y aura plus désormais trois ordres dans la société...cette ségrégation entre deux ordres privilégiés, le clergé et la noblesse...et l'autre, le tiers état représentant plus de 95% de la population...

La proclamation de l'abolition des privilèges et des droits féodaux est la réponse à la révolte qui gronde dans les provinces.
La prise de la Bastille et la crainte d'une réaction des privilégiés provoquent la panique dans les campagnes...la Grande Peur...La rumeur véhicule la présence d'armées étrangères à la solde des aristocrates et les méfaits de bandes de brigands sur les routes...Le tocsin aux églises des villages propage la frayeur collective...
Un peu partout, des paysans pillent les biens des seigneurs et du clergé. Symboles de l'Ancien Régime, les bureaux du fisc et les archives sont brûlés, en particulier les "terriens", ces registres où sont consignés les droits et les propriétés seigneuriales.
Contre la bourgeoisie qui appelle à la répression de la révolte, le rétablissement de l'ordre interviendra par l'apaisement...déjà la notion de compromis...sans faire appel à l'armée, ce qui conforterait le roi, auquel le peuple demeure attaché...
En une nuit sont abolis : les justices seigneuriales, les banalités, les jurandes et les maîtrises, la vénalité des charges, les privilèges des provinces, la corvée obligatoire...la dîme ecclésiastique acquittée uniquement par les pauvres...
Mais, les paysans ne pourront devenir propriétaires de plein droit qu'à la condition du rachat des droits pesant sur les terres (les cens et les champarts)...quelques désillusions déjà, préfigurant de nombreux conflits dans les villages...
Trois semaines après l'abolition des privilèges, est proclamée la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen.
Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune (article 1er).

Ce qui précède ne saurait être considéré comme l'exhaustivité objective d'un évènement historique marquant.
Non, sa dimension supposerait de longs développements, une analyse factuelle et politique approfondie.
Chacun en conviendra. La prétention de cette chronique se limite au rappel succint...et subjectif...de moments historiques forts.
A ouvrir un débat...qui sait ?
A entretenir l'imaginaire politique...n'est-ce pas souhaitable, tant se révèlent vides de contenu les débats actuels...
A prendre le temps d'évaluer ce qui persiste aujourd'hui de ces grands principes.
Ce moment fort de l'Assemblée Constituante aura-t-il contribué à poser les bases d'un régime politique enfin véritablement démocratique...le pouvoir aux citoyens...ou à favoriser le centralisme...
L'abolition des privilèges aura-t-elle été seulement un moyen incantatoire d'annihiler une révolte émergente...ou véritablement le début d'un processus égalitaire...la fin des inégalités. Notre sytème, fiscal notamment, repose-t-il aujourd'hui sur le grand principe de 1789 "à revenu égal, impôt égal"...
Faut-il abonder dans le sens de positions sans appel...les droits féodaux ont été rétablis...Au cours de ces dix dernières années, les riches n'ont-ils jamais été aussi riches et les pauvres aussi pauvres...et de plus en plus nombreux...
La disparition des classes sociales...généralement le terme effraie le bourgeois...réalité ou résurgence...nuit4aout_2

La question interpelle, si l'on considère la situation économique et sociale actuelle de notre pays : des milliers de salariés jetés à la rue, la fermeture de dizaines et de dizaines d'entreprises, l'évolution de la précarité dans tous les domaines, notamment dans le logement, la remise en cause d'acquis sociaux historiques instaurés par le Conseil National de la Résistance...auquel se réfère pourtant le Président de la république dans ses beaux discours...tout en poursuivant imperturbablement son oeuvre de démolition du modèle social français.
Des salaires de misère...à peine de quoi subsister...sans parfois pouvoir se loger, se soigner ou s'alimenter...
Qui oserait aujourd'hui encore affirmer que le SMIC représente le salaire de référence et in fine globalement la seule perspective.
Qui, ceux dont les revenus et les émoluments dépassent toute mesure, toute décence?
Qui, ceux qui bénéficent de niches fiscales, du bouclier fiscal?
Qui, ceux dont la fortune prospère paisiblement, bien à l'abri dans les paradis fiscaux?

Le débat s'ouvrira-t-il enfin un jour, véritablement, sans détours...
Porté par les citoyens, subsituant un engagement fort à tant...trop... de passivité ou de résignation.
Non pas la droite, elle dans son élément, sans complexes...
Par la base, les militants, la gauche, non pas celle des ambitions personnelles, des compromis ou des aggiornamentos...
Celle, collectivement ouverte à de nouveaux lendemains...
Alors quoi, une nouvelle nuit du 4 août.
Faut-il exclure l'hypothèse ou la conforter par l'espérance d'une volonté politique traduite par la gauche dans les actes...

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